Rouge pute - Perrine le Querrec

oh non pitié, arrêtez, arrêtez de toucher aux femmes, arrêtez l'horreur, devenez humain.

       Un titre percutant comme un électrochoc. Un recueil de poèmes sur le thème des violences faites aux femmes.  Des textes poignants et incisifs. Des vers scandés qui rappellent l'urgence de la situation pour une prise de conscience vitale. La routine dangereuse, mortelle, dans le huis-clos du quotidien. Quand on n'est chez soi nulle part, quand le chez-soi ne protège pas, quand il devient le lieu de l'humiliation, de la destruction, de la mort. 

        Des vers libres dont le rythme haletant traduit la respiration apeurée de ces femmes qui vivent la terreur permanente. Des femmes qui cherchent à se faire oublier du compagnon, pas bouger, pas énerver, sinon les coups tombent. Le verre de trop, le mauvais mot, la mauvaise tenue, un petit rien qui peut mettre fin à l'existence d'une compagne, d'une épouse, d'une mère. Des femmes qui ont réussi à partir. D'elles, on ne sait rien : ni prénom, ni âge, ni milieu social, ni la raison qui fait qu' elles aient pu témoigner, ce qui fait d'elles des femmes encore vivantes. Un anonymat qui les protège et qui permet de parler de toutes celles qui subissent les violences des hommes et celles qui ont vécu l'Enfer et n'en sont jamais sorties. 

      La seconde partie s'intitule "Couronne" :  un viol, la survie, porter plainte, répéter, revivre mille fois les mêmes scènes, se décourager, oublier, ne plus pouvoir dormir, planer...

En amont de l'écriture poétique, il y a la rencontre de femmes violentées qui se sont confiées durant de longues heures sur leur parcours dangereux. La poétesse devient leur voix, celle qu'on se doit d'entendre.  Un recueil très fort. "Rouge pute" fait référence à cette couleur de rouge à lèvres que l'homme interdit, et qui, une fois la liberté retrouvée, devient le symbole de la liberté féminine. Rouge pute ou la survivante qui s'expose enfin, comme elle le choisit.  

Bonne lecture ♥

Editions La Contre Allée, 2020.

(88 pages)